Le 13 septembre 2024 restera à jamais gravé dans l’histoire économique du Cameroun. Ce jour-là, le gouvernement  camerounais a franchi une étape décisive en remettant officiellement à Camalco, filiale du groupe australien Canyon Resources, le permis d’exploitation du gisement de bauxite de Minim-Martap. Ce projet titanesque, initié par le décret N°2024/382 du 2 septembre 2024   ,signé par S.E. Paul Biya, symbolise bien plus qu’une simple opération minière. Il ouvre la voie à une transformation industrielle profonde du Cameroun, avec des retombées socio-économiques qui pourraient redéfinir l’avenir du pays.

Nichée dans la région de l’Adamaoua, la bauxite de Minim-Martap est une mine aux dimensions spectaculaires. Les études ont révélé des réserves prouvées de 99,1 millions de tonnes, avec une teneur exceptionnelle de 51,6 % d’alumine. Mais ces chiffres ne représentent qu’une partie du potentiel de ce site. Sur les 16 premiers plateaux explorés, le gisement total atteint déjà 892 millions de tonnes. L’analyse des 63 autres plateaux pourrait porter ce chiffre à près de 2 milliards de tonnes, ce qui ferait de Minim-Martap l’un des plus grands gisements de bauxite au monde, tant par la qualité que par la quantité.

le lieu géographique de la prochaine exploitation du bauxite camerounais

Cette abondance de matière première place le Cameroun dans une position unique sur le continent africain. À l’horizon 2027, le pays sera le premier en Afrique à transformer localement la bauxite en alumine, un ingrédient clé pour la fabrication d’aluminium. Ce projet représente ainsi un pivot stratégique, permettant au Cameroun de passer d’une économie basée sur l’exportation brute de matières premières à une industrie intégrée de transformation.

Un projet multisectoriel pour une transformation nationale

L’impact du projet de Minim-Martap va bien au-delà de la simple exploitation minière. Il est à la croisée de plusieurs secteurs stratégiques. L’énergie, avec la construction d’une centrale électrique pour alimenter le site ; les infrastructures, avec le développement d’un réseau routier et ferroviaire reliant Minim-Martap au port de Douala ; et l’industrie, avec la future usine de transformation de la bauxite en alumine. Ce projet est un modèle d’intégration, mobilisant divers secteurs de l’économie nationale et créant des milliers d’emplois directs et indirects.

Dès 2025, la pose de la première pierre donnera lieu au recrutement de plusieurs centaines de jeunes Camerounais. Ce processus se poursuivra jusqu’en 2027, date à laquelle commencera la transformation industrielle de la bauxite. La collaboration avec Camrail pour la modernisation du tronçon ferroviaire N’Gaoundéré-Douala renforcera les infrastructures de transport, facilitant ainsi l’exportation de la bauxite et de l’alumine.

Un partage des richesses encadré et équitable

Le projet Minim-Martap s’accompagne également d’une politique rigoureuse de partage des bénéfices. L’État camerounais, à travers un ensemble de taxes et de prélèvements, s’assure une part substantielle des revenus générés par l’exploitation de la mine. Ainsi, 10 % des parts de Camalco sont détenues par l’État, qui perçoit également une taxe ad valorem de 3 % sur la valeur marchande des produits, et un partage de production fixé à 5 %. De plus, 10 % du capital de la société d’exploitation seront ouverts aux nationaux, favorisant une implication accrue des acteurs locaux dans cette aventure industrielle.

le ministre des mines et le patron de Camalco présentent le décret du président de la république

Outre les retombées financières directes, un milliard de FCFA de bonus de signature sera versé à l’État par Camalco, et une série de mécanismes, tels que le fonds de développement minier et le compte spécial de développement des capacités, garantiront que les bénéfices du projet profitent à la population camerounaise, notamment aux communautés locales. Le nouveau code minier mis en place par le gouvernement veille à ce que les retombées socio-économiques soient partagées équitablement, notamment par la création d’emplois et le financement de projets de développement local.

Une révolution industrielle à portée de main

L’octroi du permis d’exploitation à Camalco marque un tournant dans l’histoire industrielle du Cameroun. Pour la première fois, le pays s’engage sur la voie d’une transformation intégrale de ses matières premières, avec la bauxite de Minim-Martap comme levier. Ce projet ne se limite pas à l’extraction, mais englobe l’ensemble de la chaîne de valeur, jusqu’à la production d’alumine. Georges Sout, expert de l’industrie minière, résume cette vision en soulignant que « le Cameroun ne doit plus se contenter d’exporter ses matières premières, mais doit les transformer localement, créant ainsi de la valeur ajoutée et des emplois pour les générations futures. »

le ministre des mines camerounais face à la presse

Cette approche est également en phase avec une diversification industrielle plus large qui pourrait inclure, à l’avenir, la transformation d’autres ressources telles que le cuivre, le fer ou le rutile. En développant ces filières, le Cameroun pourrait franchir une étape supplémentaire vers la création d’un tissu industriel capable de soutenir des secteurs clés, tels que la construction, l’aéronautique ou encore la production de véhicules et d’équipements lourds.

Cédric Ndoungué

 

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